HISTORIQUE

L'origine du mot Eau de Javel

L'Eau de Javel tire son nom de l'ancien village de Javel (aujourd'hui quartier du 15ème arrondissement de Paris) où s'était créée, en 1784, une manufacture de produits chimiques, près du "Moulin de Javelle".

Cette manufacture était la propriété, à l'origine, de nobles proches du Comte d'Artois, frère de Louis XVI et dirigée par Léonard Alban.

Elle était destinée aux lavandières (blanchisseuses de l'époque) alors nombreuses sur les bords de Seine.

La "javelle" du latin populaire gabella est un mot d'origine gauloise ; il désignait ce qu'on rassemble par poignées.

Les lavandières, pendant le nettoyage du linge, le battait avec une poignée de branches, ce qui permettait d'extraire un maximum d'impuretés des textiles.

Sanitaires

Découverte de l'action blanchissante

Jusqu'au 18ème siècle, on pratiquait généralement le blanchiment sur pré des tissus en lin, chanvre et coton, ce qui nécessitait beaucoup d'espace et de temps. Son succès dépendait de la température, du soleil...

Claude-Louis Berthollet (1748-1822), chimiste savoyard et médecin du duc d'Orléans, savait que le blanchiment du linge sur pré était dû à l'action de l'oxygène de l'air et il chercha à reproduire artificiellement ce que faisait la nature. Il y réussit grâce aux solutions chlorées (le chlore dénommé alors "esprit de sel déphlogistiqué" ayant été découvert par Scheele en 1774).

Dans ce village de Javel, Berthollet utilisa l'eau de chlore, en 1785, pour ses propriétés blanchissantes. Les Directeurs de la Manufacture, MM. Alban et Vallet, décidèrent de dissoudre le chlore dans une solution de potasse particulièrement adaptée au blanchiment du linge et stabilisant le caractère oxydant du chlore. Ils avaient créé la "liqueur de Javel", qui devint ensuite l'Eau de Javel.

La manufacture travailla à plein rendement pendant la Révolution, s'agrandit et ne fabriqua plus que de l'Eau de Javel.

En 1875, la "fabrique d'Eau de Javel" occupait deux cents ouvriers.

Elle disparut entre 1885 et 1889, remplacée par les aciéries de France et les entrepôts et magasins généraux de Paris, lesquels cédèrent la place aux usines Citroën en 1915.

Claude-Louis Berthollet

Découverte de l'action désinfectante

En 1793 le chirurgien Percy (1754-1825) utilisa les solutions d'eau de chlore pour lutter contre "la pourriture d'hôpital" à l'armée du Rhin.

En 1820, le pharmacien Antoine-Germain Labarraque (1777-1850) remplaça la potasse par la soude et étudia les utilisations médicales et pharmaceutiques de l'Eau de Javel.

Il inventa le "Chlorure d'oxyde de soude et de chaux", variété d'Eau de Javel qui permit, entre autres choses, d'arrêter le processus de putréfaction des muqueuses. Il fit ainsi un grand pas dans le domaine de l'hygiène.

La "liqueur de Labarraque" fut utilisée par les chirurgiens, les médecins, certaines usines, les égoutiers, les fossoyeurs… Elle fut largement distribuée lors d'une épidémie de choléra, en 1832.

Il employa l'hypochlorite de sodium pour arrêter les gangrènes, accélérer les cicatrisations, désinfecter les hôpitaux...

Il obtint de nombreux prix, fut nommé à l'Académie de Médecine en 1824, au Conseil d'Hygiène Publique et de Salubrité du département de la Seine en 1836.

En 1845, Semmelweis, docteur en obstétrique à Vienne, fit tomber la mortalité par fièvre puerpérale de 27% à 0,23% grâce à l'utilisation des hypochlorites par les médecins pour le lavage des mains avant d'accoucher les femmes.

En 1892, Calmette découvrit que le bacille de Koch (tuberculose) était détruit par l'Eau de Javel. Les applications de l'Eau de Javel en désinfection se sont développées sous l'influence de plusieurs collaborateurs de Pasteur, notamment Chamberland et Fernbach.

Lors de la grande guerre, des progrès décisifs en hygiène furent accomplis par les médecins et les militaires :

  • Lors de la bataille de Verdun, l'Armée française encerclée, et ne disposant plus d'eau potable, le Colonel Bunau-Varilla, directeur du service des eaux de l'armée mélangea un petit stock d'Eau de Javel à l'eau de la Meuse pour alimenter les troupes en eau potable (d'où l'expression "verdunisation" synonyme de potabilisation à l'Eau de Javel).
  • Le Docteur Fernand Bezançon prouva le pouvoir bactéricide de l'Eau de Javel sur le linge contaminé
  • Les solutions tamponnées d'Eau de Javel furent utilisées comme antiseptiques, d'abord par le Professeur Dakin, pour désinfecter les plaies des blessés, puis par le Docteur Carrel, dans les ambulances dont il avait la charge. Le procédé se généralisa ensuite très rapidement.

Grâce à son spectre microbien le plus large connu à ce jour, l'Eau de Javel est utilisée pour lutter contre la propagation des maladies : fièvre typhoïde, choléra, hépatite virale, SIDA, grippe aviaire...

C'est également la raison pour laquelle, en Juillet 1969 la NASA sélectionna l'Eau de Javel pour désinfecter Apollo XI au départ et à son retour de la lune pour éviter toute contamination éventuelle Terre/Lune et vice-versa.

En 1989, pour la deuxième fois depuis sa découverte, l'effet bactéricide de l'Eau de Javel est mis en évidence par le Professeur Dodin de l'Institut Pasteur. Ses travaux révèlèrent, à l'aide d'un microscope électronique, que les bactéries sont détruites en 30 secondes avec une solution d'Eau de Javel à 0,036 % de chlore actif.

En 2008, l'activité virucide de l'Eau de Javel sur le virus Influenza virus A/H5N1 a été démontrée par l'Institut Pasteur de Lille.

Albert Calmette

Albert Calmette

(1863-1933)

André Dodin

André Dodin

(1926-1995)

Les médias livrent quotidiennement leur lot d'informations sur de nouvelles maladies et épidémies et les difficultés à les combattre. Pour en limiter la propagation, la prévention est plus que jamais nécessaire et passe par une hygiène irréprochable, renforcée par une désinfection régulière de notre environnement. Dans ce contexte l'Eau de Javel, facile à utiliser et particulièrement efficace, est incontournable. C'est en effet un désinfectant universel, bactéricide, fongicide, sporicide et virucide, accessible à tous.